samedi 10 novembre 2012


Chat craint...
Aujourd’hui à Tunis, j’ai vu des chattes, beaucoup de chattes. Il y en avait les jours précédents, mais aujourd’hui je les ai plus remarquées. Elles survivent en éventrant les petits sacs poubelles déposés au bord des routes ou dans les allées bordées d’habitations. Des sacs de supérettes qu’on peut déchirer facilement, même avec une mâchoire édentée. Des chattes grises, des beige-blanc, noires, tigrées…des miteuses, des fières, des de gouttière qui se mettent à table sur les tas de petits sacs poubelles de supérette.  Mais pas le chaton mort allongé sous le buisson près du métro léger. A côté de lui au milieu du trottoir une petite chatte grise est assise et me suit du regard parce que je lui parle bêtement. " Le petit chat est mort...c'est triste. Tu es de la famille? " Elle semble m’écouter et me hume avec son petit nez.

Ça me retourne comme une crêpe fourrée au-ronron-souris.

Mais elles ne se plaignent pas les chattes, c’est moi qui m’apitoie.

A courir partout dans la ville de Tunis et sa banlieue, j’ en ai oublié mon agenda : chez une artiste plasticienne connue, non pas pour ses œuvres mais pour le tollé que son travail a provoqué en juin dernier vis-à-vis des islamistes pas du tout modérés qui ont attaqué la galerie d’exposition à la Marsa et détruit des œuvres.

Le gouvernement a traduit en justice l’artiste plasticienne parce que les casseurs ont porté plainte contre elle : « trouble de l’ordre public ». Mais les vandales, ils ont eu que dalle.
Les représentants politiques ont dit : «  Tout de même, il y a des choses qui ne se font pas » en direction de l’artiste, mais pas des voyous.

L’artiste attend donc de passer en procès et risque entre 6 mois et 5 ans de prison.
Elle continue son travail d’artiste plasticienne, même si elle ne peut pas exposer, même si elle est obligée de se défendre, même si elle devenue malgré elle l’incarnation de la lutte pour la liberté d’expression même si elle est très fatiguée de tout ça.

 « Mais moi ça va, me dit-elle, j’ai de la chance :  j’ai des avocats, la presse internationale a réagi à cette affaire, je continue mon travail, j’ai un peu de poids, je me défends. Mais il y a 6 mois, 2 gamins de 23 ans ont été arrêtés parce qu’ils avaient posté des caricatures de Mahomet sur Facebook. Un a réussi « à brûler » (s’enfuir) à l’étranger mais l’autre il en a pris pour 7 ans. 
Tu le savais ? Non, personne n'est au courant."
  
Ça me retourne comme un flan sans caramel pour-que-ça-glisse-mieux.

Mais elle ne se plaint pas l’artiste plasticienne, elle est tunisienne.

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