Le métro léger, la main lourde et la mini-loose
Aujourd’hui je devais me rendre dans un quartier de Tunis appelé
Menzah 5. Quartier chic avec des magasins de standing mais avec la
particularité d’avoir des trottoirs complètement déglingués ( il paraît que c
est la faute des 4 4).
A 13H le taxi jaune que je hèle pour me déposer à mon rdv me
dit : « Ha non madame trop de
bouchons…prends le métro s’il te plait, c’est mieux ». Ce n’est pas un
tacot parisien qui me dirait ça. C’est parti pour le métro vert, le métro léger
comme on l’appelle ici. Léger comme le prix du ticket 25 centimes d’euros. Le quai du métro grouille de monde. Il fait chaud
et humide. Tellement lourd que j’ai l’impression de transpirer du gras. La
femme a coté de moi porte un long manteau, un voile fermé et des gants. Elle n’a
pas l’air de souffrir de la chaleur. Sa peau n’est même pas luisante. De la
regarder me donne encore plus chaud. L idée que je sois en pleine pré-ménopause
me traverse l’esprit. Esprit en pleine sieste parce que ça ne me fait ni froid…
ni froid.
Le métro arrive enfin, aussi bondé que sur le quai. Avec
fracas les portes s’ouvrent et les marchepieds se déploient : la marée
humaine du dedans essaie de descendre tandis que la marée humaine du dehors
essaie de monter. S’il ne faisait pas aussi chaud je trouverai ça marrant. Mais
là je trouve ça navrant dans ma peau de poisson frit.
C’est du gros n’importe quoi et pourtant personne n’agresse
personne. C’est comme en voiture : ça roule à toute berzingue et personne
se s’arrête aux feux rouges ou ralentit pour te laisser traverser. Le piéton
est une quille dans un jeu de bowling. Dès que tu mets le pied sur la chaussée,
on dirait que les voitures te foncent dessus. Lâcher un cardiaque prêt d’un
passage piéton tunisien c’est le strike du crime parfait.
Dans le métro léger, les lignes ne sont pas affichées ou
très rarement. Idem pour les noms des stations : parfois c’est visible
parfois non. Mais il y a quelque chose
qui marche vraiment bien pour savoir où on est, c’est le contact. Tu n’as même
pas besoin de demander : le tunisien te voit chercher et il vient à ton
secours. Et en français s’il vous plait. Ca parait évident mais je suis impressionnée
de ce peuple parfaitement bilingue qui va jusqu’à inventer un troisième langage
en utilisant les deux langues dans une même phrase.
«N’harleff…Benti pour aller à Menzah 5 il faut prendre
l’autobus n°5 ». Evidement.
C’est dans la peau d’une frite sortie de son 1er
bain d’huile que je monte dans le bus en question. Je tends ma pièce de monnaie
au chauffeur qui l’ignore et m’envoie vers le fond. Dans les bus tunisois, la
montée se fait par l’arrière et la descente par l’avant. A l’arrière il y a le
petit monsieur qui délivre les billets. Installé sur sa chaise il a un petit
comptoir avec ses petits tickets, son tampon et sa caisse de monnaie. Purée à l’ancienne.
Deux jeunes filles sont debout à quelques mètres de moi,
appuyées à la vitre, elles discutent en regardant à l’extérieur. Elles sont belles comme des
fleurs au début du printemps. Derrière elles, une autre jeune fille, à la peau
noire et au jean slim saumon, collée à la vitre. Elle me tourne le dos, je ne
vois pas son visage, juste son derrière particulièrement bombé comme les fesses
d’une sprinteuse. A côté d’elle, ou plutôt devant ses fesses et me faisant
face, un jeune type de 20 ans, seul, qui sourit par intermittence. Bien qu’il
soit propre et bien habillé, il me parait louche souriant béatement à chaque secousse ou accélération du bus.
Il tient la barre au dessus de sa tête avec sa main gauche mais son corps est anormalement déporté sur sa
droite.
J’observe, les moments où il sourit, les moments où il s’arrête…on
dirait que ça clignote dans sa tête. Le jean slim saumon se pousse par moment
et le corps du jeune type suit le mouvement. Pas tout le corps…juste sa main …
qui se colle au tissu saumon du jean slim…contre les fesses musclées de la
jeune fille.
Oh le petit halouf (je bilingue aussi).
Je m’approche du l'apprenti
satyre de la ligne de bu n°5, lui plante mon regard suintant dans le sien tout content et
lui siffle à l’oreille : « Dis donc jeune homme, vous voulez les
miennes de fesses à tripoter ? » Il me sourit incrédule et me répond naïvement
« Oui madame si ça peut vous faire plaisir ».
C’est officiel, je suis en pré-ménopause sous le soleil de
Tunis.
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